Jean LOWENSTAMM : « À propos des gabarits »
L’objectif de cet article est d’introduire quelques notions fondamentales de morphologie non-concaténative ou gabaritique. Les résultats principaux d’une décennie de recherche très productive – celle des années quatre-vingt – sonta présentés. En même temps, l’attention du lecteur est attirée sur les limites du programme. Il est soutenu que certains des aspects majeurs de l’organisation sonore des objets grammaticaux gabaritiques sont déterminés en dehors de la phonologie elle-même.
MOTS-CLÉS : Phonologie, morphologie, gabarits.
Outi BAT-EL : « The Fate of the Consonantal Root and the Binyan in Optimality Theory »
Cet article propose une analyse de la morphologie non-concaténative en hébreu moderne dans le cadre de la Théorie de l’Optimalité. Il est soutenu que le mot est la base de la dérivation, modifiée par des contraintes assignant une structure prosodique, une mélodie vocalique et des affixes, le cas échéant. La notion de gabarit est vue comme une configuration des structures assignées par ces contraintes. La racine consonantique est entièrement éliminée de la grammaire. Ce dernier point est défendu sur la base d’arguments provenant du changement diachronique et de l’apprentissage.
MOTS-CLÉS : Morphologie prosodique, Théorie de l’Optimalité, hébreu, binyan, racine consonantique, changement historique.
Mohamed LAHROUCHI : « Manifestations gabaritiques dans la morphologie verbale du berbère (parler chleuh d’agadir) »
En berbère tachelhit, les verbes causatifs et réciproques sont construits par la préfixation d’un affixe monoconsonantique à une base. En fonction des propriétés de la base, ces préfixes seront réalisés comme des consonnes simples ou géminées. Il est soutenu dans cet article qu’un site gabaritique initial est responsable des variations de taille des préfixes. De plus, des combinaisons complexes de préfixes (causatif + réciproque, réciproque + causatif) nourrissent des phénomènes phonologiques apparement paradoxaux. Il est montré qu’ils découlent directement de la présence du site initial.
MOTS-CLÉS : Morphologie, phonologie, gabarits, dérivation, causatif, réciproque, berbère, tachelhit.
Maya ARAD : « Why Syntax Matters »
Les travaux sur les processus de formation de mots en hébreu insistent souvent sur les aspects morphologiques et phonologiques. Dans cet article, l’idée est défendue que l’information syntaxique doit être prise en considération, même pour des processus qui semblent à première vue relever exclusivement de la phonologie et de la morphologie. Cette position est soutenue dans le contexte de la discussion de deux études : le traitement des verbes dénominaux de Bat El (1994), qu’elle généralise à l’ensemble des verbes de l’hébreu ; et la discussion consacrée par Aronoff (1994) aux patrons verbaux (binyanim), dans laquelle il reconnaît un statut spécial aux formes passives. Dans le premier cas, il est montré que la syntaxe des verbes dénominaux établit clairement qu’ils sont différents des verbes dérivés directement de racines, et que leur analyse ne peut donc pas être généralisée. Dans le second cas, il est montré que le statut spécial des passifs découle directement de leur structure syntaxique, et n’a donc pas à être stipulé.
MOTS-CLÉS : Racines, binyan, formation de mots, hébreu.
Alain KIHM : « Les pluriels internes de l’arabe : système et conséquences pour l’architecture de la grammaire »
Les pluriels internes des noms et des adjectifs en arabe, aussi appelés pluriels “brisés”, posent un défi à la théorie morphologique : ils ne mettent pas ouvertement en jeu l’affixation d’un morphème de pluralité, mais semblent plutôt reposer sur un contraste de formes qui, si elles partagent la même racine consonantique, diffèrent, entre autres, pour la vocalisation. Cet article propose une analyse de la formation des pluriels internes qui dérive toutes les formes par un unique processus, à savoir l’insertion de l’un des trois glides /I/, /U/ et /A/ dans un site particulier localisé entre la 2e et la 3e consonne radicale, le site post-C2, avec pour effet la création d’une position d’attaque (C) ou de noyau (V). Il explore ensuite les conséquences de cette analyse pour l’organisation générale de la grammaire. On y développe une version modifiée de la théorie dite “Morphologie Distribuée”, telle que le lexique est conçu comme un ensemble d’ensembles d’éléments pourvus de significations mais dépourvus de forme, et l’épel est une fonction qui prend des ensembles d’éléments pour produire des objets phonologiques bien formés, à savoir des suites CV.
MOTS-CLÉS : CV (phonologie), ensemble (théorie des), fonctions, gabarit, glides, (non) concaténative (morphologie), site.
Sabrina BENDJABALLAH et Martin HAIDEN : « Templatic Architecture »
En se fondant sur les principes de la Phonologie du Gouvernement, cet article présente une théorie minimaliste de la projection. Deux opérations, merge et label, sont postulées et formalisées en termes mathématiques – soit, respectivement, la multiplication et l’intégration. Dans le cadre de cette formalisation, l’interprétation syntaxique des entités phonologiques peut être comprise comme un morphisme au sens strict, c’est-à-dire une application préservatrice de structure par rapport à merge. Ce formalisme permet de dériver une condition simple, mais inexpliquée, sur les gabarits des verbes forts de l’allemand : un site gabaritique unique ne peut pas être l’hôte de marqueurs qui correspondent à des têtes syntaxiques distinctes.
MOTS-CLÉS : Morpho-phonologie, syntaxe algébrique, verbes allemands.