Paris 8 - Université des créations

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Revue Médiévales. Langue Textes Histoire
Nombre de pages : 192
Langue : français
Paru le : 10/07/2000
EAN : 9782842920777
Première édition
CLIL : 3386 Moyen Age
Illustration(s) : Non
Dimensions (Lxl) : 220×155 mm
Version papier
EAN : 9782842920777

L’invention de l’histoire

N°38/2000

Marqué par la chute de Rome et l’instauration de la religion chrétienne, qui semblait n’offrif d’autre alternative que l’au-delà, le Moyen Age a longtemps paru étranger à tout véritable intérêt pour l’histoire.

 Il n’a cessé pourtant de renouer avec le passé, de s’inscrire dans une continuité temporelle, de fonder les lignées détenant le pouvoir territorial, d’inventer un récit capable de légitimer le présent et de donner un sens aux réalisations humaines.

 

Christopher Lucken et Mireille Seguy
L’invention de l’histoire

 

Monika Otter
La
Vie des deux Offa, l’Enfance de saint Edmond et la logique des “antécédents”

 

Christopher Lucken
La fin des temps et la fiction des origines. L’historiographie des îles britanniques: du royaume des Anges à la terre des Bretons

 

Catherine Croizy-Naquet
Écrire l’histoire: le choix du vers ou de la prose au XIIIe siècle

 

Olivier Collet
Littérature, histoire, pouvoir et mécénat: la cour de Flandre au XIIIe siècle

 

Colette Beaune et Élodie Lequain
Femmes et histoire en France au XVe siècle: Gabrielle de la Tour et ses contemporains

 

 

ESSAIS ET RECHERCHES

 

Fanny Caroff
Différencier, caractériser, avertir: les armoiries imaginaires attribuées au monde musulman

 

Stéphane Gioanni
Moines et évêques aux Ve et VIe siècles: la controverse entre Augustin et les moines provençaux

 

Jean-Yves Tilliette
La peau du loup, l’Apocalypse. Remarques sur le sens et la construction de l’
Ysengrimus

 

Notes de lecture
Livres reçus
Index
 

 Monika Otter : « La vie des deux Offa, l’enfance de saint Edmond et la logique des “antécédents” »
Cet essai examine deux textes à la frontière de l’historiographie et du roman : les
Vitae duorum Offarum de Matthieu Paris et le De Infantia sancti Eadmundi de Gaufridus de Fontibus. L’un et l’autre sont conçus comme des “antécédents” aux histoires monastiques existantes, étendant le récit de fondation de leurs maisons respectives (Saint Albans et Bury St Edmunds) encore plus loin dans le passé. Alors même qu’ils espèrent être pris sérieusement comme des textes historiques, ils ressemblent aux enfances des chansons de geste et des romans, utilisant largement leurs propriétés formelles et leurs motifs narratifs. Une telle hybridité, loin de les miner, travaille à leur avantage. En particulier, c’est la logique spécifique de l’antécédent qui permet à ces textes de fonctionner. Reposant sur des récits déjà existants et les glosant après coup, l’antécédent prétend venir chronologiquement avant le récit antérieur, l’annoncer et le motiver. Cette ambiguïté enlève l’accent accordé à la référence historique et déplace la revendication de vérité du récit sur un plan purement textuel, ce qui, à l’évidence, est utile pour ce genre d’histoire imaginaire et de propagande à laquelle les chroniqueurs monastiques s’emploient.

Christopher Lucken : « La fin des temps et la fiction des origines. L’historiographie des îles britanniques : du royaume des anges à la terre des Bretons »
Deux tendances radicalement différentes semblent se partager la production historiographique médiévale. L’une, inaugurée par l’
Histoire ecclésiastique d’Eusèbe et dominée par les réflexions qui a consacrées saint Augustin (et de loin la plus importante), s’attache à retracer le destin des hommes appelés à se rassembler au sein de l’Église afin d’être portés vers un avenir qui doit leur permettre de sortir de l’histoire et de se retrouver à la fin des temps au sein de la Cité de Dieu. L’autre, renouant avec la tradition antique rejetée par l’historiographique chrétienne, se consacre à une communauté définie qu’elle pourvoit d’une origine et d’un passé qui fondent son identité et son existence présente, mais qui semblent en même temps constamment menacées par la fiction. Après avoir rappelé le point de vue de saint Augustin, et afin de mettre en lumière cette double orientation, cette étude s’appuie principalement sur l’historiographie des îles britanniques : à l’Histoire ecclésiastique du peuple anglais de Bède répond en effet l’Histoire des rois de Bretagne de Geoffroy de Monmouth. La critique adressée à ce dernier par Guillaume de Newburgh au seuil de son Histoire des choses anglaises, s’en prenant au caractère fictif des événements attribués au roi Arthur et aux prophéties de Merlin, éclaire de manière exemplaire le sens de l’opposition entre une histoire devant aboutir au ciel et celle qui trouve son assise sur la terre.

Catherine Croizy-Naquet : « Écrire l’histoire : le choix du vers ou de la prose aux XIIe et XIIIe siècles »
Au XIIe siècle, l’invention du discours historique se produit de manière privilégiée dans des oeuvres qui, adaptant les légendes de l’Antiquité et/ou retraçant l’histoire d’un peuple ou d’une dynastie, mettent au point, dans l’espace du couplet octosyllabique, des procédés littéraires inédits en
romanz, dont un protocole descriptif chargé de restituer les couleurs du passé. La même entreprise s’observe dans quelques chroniques de croisade où les expéditions sont relatées suivant la trame chronologique des événements, en termes épico-romanesques. À la charnière des XIIe et XIIIe siècles, des voix critiques s’élèvent cependant contre ces “contes rimés” (Nicolas de Senlis), jugés mensongers parce qu’ils sont composés en vers : celui-ci requiert en l’effet des artifices contraires au travail de l’historien. La focalisation sur la question de la forme, qui infère, en règle générale, le choix de la prose contre le vers, engage une nouvelle réflexion sur l’histoire, sur ses liens avec la littéraire et la fiction, et donne lieu à des oeuvres historiques variées &endash; histoires anciennes et chroniques de croisades aussi bien &endash; qui, dans le souci d’être au plus près du réel, dénient tout ce qui ressortit au vers ou en utilisent certaines composantes pour créer une prose sophistiquée. Bien que la problématique de la forme ne soit qu’un aspect de l’historiographie en langue romane, elle permet à l’évidence de poser ses enjeux essentiels et de cerner les desseins que s’assignent les auteurs.

Olivier Collet : « Littérature, histoire, pouvoir et mécénat : la cour de Flandre au XIIIe siècle »
Période de l’émergence de l’historiographie vernaculaire, le XIIIe siècle voit également se produire la mise sous tutelle progressive des vassaux du nord de la France par les Capétiens. La rivalité qui se joue entre ces deux milieux semble également se traduire dans les formes de patronage qu’ils exercent. En effet, le pouvoir royal encourage surtout l’activité des historiens, en langue aussi bien française que latine, tandis que les cours septentrionales &endash; en premier lieu celle de Flandre &endash; restent attachées à un genre de mécénat qui favorise essentiellement la création littéraire d’expression française. Littérature et histoire offrent ainsi le reflet de deux mentalités politiques et de leurs différences d’attitude.

Colette Beaune, Élodie Lequain : « Femmes et histoire en France au XVe siècle : Gabrielle de La Tour et ses contemporaines »
Les manuels d’éducation féminine de la fin du Moyen Âge font une place accrue à la lecture d’ouvrages pieux certes mais aussi d’ouvrages historiques cette tendance sera accentuée par la pédagogie humaniste. L’histoire est en effet bien adaptée au sexe faible matière en français, matière simple, matière exemplaire elle forme puis maintient dans le droit chemin. Les réalités correspondent en partie à la norme les bibliothèques des princesses du XIVe et XVe siècles comprennent de plus en plus de livres historiques et effectuent des choix qui privilégient l’histoire nationale et celle des croisades. L’exemple de la bibliothèque de Gabrielle de La Tour (1474) permet de montrer les utilisations concrètes de l’histoire dans la formation d’une identité propre à l’apanage des Bourbons Montpensier.

Fanny Caroff : « Différencier, caractériser, avertir : les armoiries imaginaires attribuées au monde musulman »
Dans les récits illustrés des croisades, comme les traductions françaises de la Chroni que de Guillaume de Tyr enluminées entre le XIIIe et le XVe siècles, les musulmans affrontés aux croisés ont reçu des armoiries imaginaires. Les imagiers ont utilisé les différents éléments constitutifs des armoiries (supports armoriés, figures héraldiques, couleurs) pour distinguer les protagonistes et transmettre des informations sur les musulmans, ou tout au moins les signaler comme les antagonistes. Les armoiries sont aussi des constructions de lignes et de couleurs qui participent à la dynamique de l’image : elles peuvent produire de fortes impressions visuelles à même de capter l’attention des lecteurs. Le contenu des armoiries et leurs incidences structurelles dans la composition des images doivent être analysés conjointement pour mesurer la portée des armoiries imaginaires dans la caractérisation de l’adversaire musulman. L’unité cohérente d’un manuscrit ou l’unité conjoncturelle d’une image peuvent servir cette approche méthodologique.

Stéphane Gionni : « Moines et évêques en Gaule aux Ve et VIe siècles : la controverse entre Augustin et les moines provençaux »
Quelques années avant la mort de saint Augustin, les moines provençaux contestent le fatalisme de la doctrine de la prédestination. Ils redoutent qu’elle ne mette en cause la valeur de l’ascèse et l’efficacité de la prédication. Contemporaine de l’institutionnalisation de l’Église et de l’accession des moines provençaux au pouvoir épiscopal, cette controverse pose donc le problème d’une excellence monastique dans l’Église. Elle révèle que la célébration du modèle ascétique remplit, dès le Ve siècle, un rôle déterminant dans l’essor du mouvement monastique, dans l’exercice du pouvoir épiscopal et dans l’édification de la société chrétienne.

Jean-Yves Tiliette : « La peau du loup, l’Apocalypse. Remarques sur le sens et la construction de l’Ysengrimus »
L’épopée animale la plus longue du Moyen Âge latin, l’
Ysengrimus, écrite en Flandres autour de 1150, a longtemps été considéré comme une simple, et pédante, anticipation du Roman de Renart. À travers l’analyse des structures rhétorique et narrative, on essaye ici de montrer que son auteur anonyme, un moine, avait un double but, tous deux précis et particuliers : exprimer la colère des milieux cléricaux rigoristes contre les autorités ecclésiastiques, coupables d’avoir trahis les idéaux originaux de la Croisade et, en même temps, mettre en question, au moyen de la parodie, le genre littéraire païen de l’épopée virgilienne.

 Monika OTTER : « The Two Offas, St. Edmund’s Childhood , and logic of the Prequel »
This essay examines two Latin texts on the borderline between historiography and romance : Matthew Paris’s Vitae duorum Offarum and Gaufridus de Fontibus De Infantia sancti Eadmundi. Both are conceived as “prequels” to existing monastic histories, extending the foundation history of their respective houses (St. Albans and Bury St. Edmunds) farther into the past. While both wish to be taken seriously as historical texts, they resemble the enfances of vernacular chanson de geste and romance and make extensive use of their formal properties and narrative motives. This hybridity, far from undermining them, works to their advantage. In particular, it is the peculiar narrative logic of the prequel that makes these texts work. Based on an alreadly existing narrative and glossing it after the fact, a prequel pretends to come chronologically before that prior narrative and to prepare and motivate it. This ambiguity deemphasizes historical reference and shifts the narrative’s truth claim into a purely textual level, which is obviously helpful for the kind of imaginative, propagandistic history these monastic chroniclers are engaged in.

Christopher LUCKEN : « The End of Time and the Fiction of Origins. Historiography of the British Isles : from the Kingdom of Angels to the Land of Britons »
Two conceptions radically different, seem to share the medieval historiography. The first (and far most important) one, initiated by Eusebius’Ecclesiastical History and dominated by the reflections saint Augustine has devoted to it, recalls the destiny of human beings who should put themselves together under the conduct of the Church, in the expectation of a future which will allow them to get out of History and find themselves at the End of Times inside the City of God. The other one, linked to the tradition produced in Antiquity but rejected by Christianity, assigns itself a clearly defined community to which is given an origin and a past, supposed to found its identity and present existence, yet constantly threatened by fiction. After having summoned saint Augustine’s position, and in the view of making clear this double orientation, this paper concentrates on the historiography of the British Isles : to Bede’s History of the English Church and People replies indeed Geoffrey of Monmouth’s History of the Kings of Britain. The criticism William of Newburgh addresses to the later in his History of English Affairs, reproving the fictitiousness of the events ascribed to the reign of King Arthur and the prophecies of Merlin, reveals in a very illuminating way the meaning of the opposition between a History which should end in Heaven and one which finds its foundation on Earth.

Catherine CROIZY-NAQUET : « Writing History : the Choice of Verse or Prose in the XIIth and XIIIth Century »
In the l2th century, the invention of the historical discourse preferentially occurs within the works which, while adapting the antique legends and/or relating the history of a people and a dynasty, create inside the octosyllabic verses some literary methods original in romanz, such as a descriptive protocole made to restore the colors of the past. The same process may be observed in some cruisades chronicles where the expeditions are related according to the chronology of the events, in an epic and novelistic way. On the fronteer between the 12th and the l3th century, some protestations raise against these “contes rimés” (Nicolas de Senlis), considered as untrue because they are made in verses : verses actually demand some artificial means opposite to the historical work. The interest for the method of procedure, which generally induces the choice of prose instead of verse, leads to a new reflection upon history, its links with literature and fiction, and it gives way to different historical works (either old histories or cruisades chronicles) which intend to be as realistic as possible and refuse verses or use them in order to create a refined prose. Although the choice of the method of procedure is only one of the points, it obviously raises the real questions about historiography in the romance language and it permits to approach the writers aims.

Olivier COLLET : « Literature, History, Power and Patronage : the Court of Flanders in the XIIIth Century »
The thirteenth century witnessees the emergence of vernacular historiography as well as the progressive supervision of the northern vassales by the Capetians. The rivality that occurs between those two circles seems also to appear through the nature of patronage they assume : the royal authority thus encourages above alI historical french and latin works when the northern courts (especially the flemish one) give its favour to a kind of patronage that favorishes principally the french literary production. Literature and history thus reflect two political mentalities and their very differences.

Colette BEAUNE et Élodie LEQUAIN : « Women and History in XVth Century France : Gabrielle de La Tour and her Contemporaries »
Late medieval bookes of instructions for women strongly encourage their audience to read pious literature, which is natural, but also historical works. This tendency is reinforced by humanist pedagogy. History is in fact well suited for the weaker sex : a subject written in French, simple, exemplary, it instructs and keeps the student on the right path. Reality corresponded, in part, to such an model : the libraries of princesses in the XlVth and XVth centuries display and ever increasing number of History books and the privileged place given to national History and the crusades. The concrete utilisation of History in the formation of an identity can be illustrated through the Iibrary of Gabrielle de la Tour (1474), who belonged to the Bourbon Montpensier circle.

Fanny CAROFF : « To differentiate, characterize and warn : the attribution of imaginary coats of arms to the muslim world »
In the illustrated narratives of the crusades, as well as the French translations of the Chronicle of William of Tyre illuminated between the thirteenth and fourteenth centuries, the Muslims confronting the crusaders are provided with imaginary coats of arms. The painters used different constituent elements of armorial bearings (armorial supports, heraldic figures, colors) to distinguish the protagonists and transmit information about the Muslims, or at least signal them out as the antagonists. The coats of arms also present linear and colorful constructions which heighten the vivacity of the images, and help produce strong visual impressions which capture the reader’s attention. The designs of the coats of arms and their structural incidence on the pictorial composition should be analyzed jointly in order to measure the significance of these imaginary heraldic devices in their characterization of the Muslim adversary. The coherent unity of a manuscript or the circumstantial unity of an image may help this methodological approach.

Stéphane GIOANNI : « Monks and Bishops in Fifth Century Gaul : the controvers between Saint Augustine and the monks of Provence »
Several years preceding the death of Saint Augustine, the monks of Provence contested the fatalism of the doctrine of predestination. They feared it might call into question the merits of ascetism and preaching. Contemporaneous with the institutionalization of the Church and the accession to episcopal power by the Provençal monks, this controversy consequently poses the problem of monastic excellence in the Church. lt reveals that the celebration of the ascetic model, from the fifth century onwards, plays a determinant role in the rise of the monastic movement, in the exercise of episcopal power, and in the edification of Christian society.

Jean-Yves TILLIETTE : « The wolf’s skin and the Apocalypsis. Some remarks on the meaning and structure of the Ysengrimus »
The Iargest beast epic of the Latin middle ages, the Ysengrimus, written in Flanders about 1150, has long been considered a mere, and pedantic, foreshadowing of the Roman de Renart. One attempts here to show, through the analysis of its rhetorical and narrative patterns, that its anonymous author, a monk, aimed at two goals, both precise and specific : to express the anger of a rigid clerical background against ecclesiastical authorities, considered guilty of having betrayed the original Crusades’ideals and at the same time, to challenge radically, by means of parody, the pagan literary genre of vergilian epic.

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Revue Médiévales. Langue Textes Histoire
Nombre de pages : 192
Langue : français
Paru le : 10/07/2000
EAN : 9782842920777
Première édition
CLIL : 3386 Moyen Age
Illustration(s) : Non
Dimensions (Lxl) : 220×155 mm
Version papier
EAN : 9782842920777

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