La littérature haïtienne contemporaine, particulièrement dense et diverse, occupe une place majeure dans les littératures francophones. Régulièrement consacrée par des prix littéraires prestigieux, elle présente de multiples visages.
Face à ce foisonnement et à cette luxuriance, le critique devient promeneur et comme le botaniste herborise à la découverte de ce qui est rare ou précieux. Ainsi, les auteurs du présent ouvrage sont devenus randonneurs et proposent des avancées différenciées pour une connaissance approfondie de la littérature haïtienne.
Le rapport entre langues et littérature est la première étape du parcours. Dominique Fattier ouvre la réflexion sur l’évolution du rapport entre langues et littérature. Jean Durosier Desrivières poursuit en s’intéressant à l’usage bruissant et métissé de la langue. Violaine Houdart-Merot s’attaque à l’œuvre déroutante de Franketienne, célébré aujourd’hui comme « le » poète haïtien. Corinne Blanchaud laisse la parole à René Depestre qui explique « ses emprunts au créole ».
La seconde halte intitulée « Fictions et poids de l’Histoire » présente le traitement littéraire de quelques figures ou moments historiques d’Haïti. Charles Forsdick revient sur la figure patrimoniale de Toussaint Louverture. En revanche, dans son roman « Dessalines ou de la déception », Guy Poitry, écrivain suisse, n’a pas souhaité aller du côté de Toussaint Louverture, personnage trop sollicité à son goût par les historiens et les écrivains. Revenant sur l’histoire immédiate, Sylvie Brodziak propose la lecture d’un roman « mémoriel » de Lyonel Trouillot, autre écrivain contemporain essentiel.
Dans un troisième temps, née des ruptures de l’Histoire et des blessures de la mémoire, la littérature haïtienne est parcourue en tant que littérature de l’exil et de l’émigration. Fulvio Caccia retrace la genèse du concept de « littérature migrante » forgé à la fin des années 1980 dans les deux espaces conjoints Montréal/Haïti. Lise Gauvin revient d’une manière fort originale sur le concept d’écriture de l’exil en présentant le Fonds «Émile Ollivier » de l’Université de Montréal. Antony Soron centre son propos sur la lecture du Prix Médicis 2009, L’énigme du retour de Dany Laferrière et rappelle qu’avec cette œuvre, D. Laferrière se place dans une « tradition » : celle du retour des partants.
Enfin la dernière étape s’intéresse aux écrivaines haïtiennes oubliées ou encore méconnues. Nicole Michel-Grepat rend hommage à l’œuvre insolente de Marie-Célie Agnant. Bruno Doucey fait une présentation particulièrement séduisante et efficace de l’Anthologie de la poésie féminine haïtienne qu’il a éditée en 2010.
Christiane Chaulet Achour conclut sur les vicissitudes de la réception en interrogeant une partie de celle-ci à travers l’attribution des Prix Littéraires
Ces auteurs-promeneurs, en empruntant des voies d’approche multiples et très personnelles, permettent de dessiner de façon originale les points forts d’une littérature haïtienne en pleine effervescence.